Le spectre d'une sortie de l'Europe de la part du Royaume-Uni est plus présent que jamais, à quelques jours de la date limite accordée par Donald Tusk, le président du Conseil européen, aux Britanniques. L'Europe veut que le Royaume-Uni s'engage ou sorte de l'Union Européenne au plus tard le 12 avril, afin d'avoir le temps de préparer les élections européennes dans le cas où l'option 'Remain' (rester) serait validée.

C'est un vote de la Chambre des communes britannique qui décidera de l'acceptation d'un accord de retrait permettant un Brexit avec conditions, qui assurerait une sortie de l'Union Européenne mais permettrait de donner plus de temps pour négocier des conditions favorables à la poursuite des échanges commerciaux entre l'Union et le Royaume-Uni. Mais si aucun accord n'est trouvé, le Royaume-Uni deviendra un État tiers, c'est-à-dire sans aucun lien avec l'Europe, qu'il soit politique ou commercial. Dans ce cas, le secteur de l'automobile serait grandement touché, puisque les échanges commerciaux transitant par le Royaume-Uni représentent 17 % du marché européen global.

En 2018, 1,85 million de véhicules ont été importés d'Europe au Royaume-Uni, représentant 53,4 milliards d'euros de valeur. L'inverse est tout aussi impressionnant puisque le Royaume-Uni a exporté 735'000 voitures, pour une valeur de 24,7 milliards d'euros. Mais ce n'est pas tout puisque les voitures fabriquées et vendues au Royaume-Uni représentent 12,6 milliards d'euros. Ce sont donc 2,91 millions de véhicules, représentant 90,7 milliards d'euros de revenus, qui sont concernés par le Brexit.

Les acteurs les plus touchés du secteur sont les grands groupes et les grosses alliances de l'automobile, à l'image de Volkswagen Group, dont les activités au Royaume-Uni ou en lien avec celui-ci représentent 16,2 milliards d'euros. Du côté de Jaguar Land Rover, où la suppression d'emplois liée au Brexit a commencé, ce sont 13,5 milliards d'euros qui sont en jeu. Les groupes français sont également largement concernés avec 12,8 milliards d'euros pour l'alliance Renault-Nissan et 11,3 milliards pour PSA.

Une stratégie globale à revoir

Les marques anglaises sont évidemment celles qui se retrouveraient les plus isolées ; elles sont trois : Aston Martin, McLaren et Morgan, dont 100 % des ventes européennes dépendent du lien entre l'Union et le Royaume-Uni. Mais derrière ces marques purement britanniques, on retrouve le groupe Jaguar Land Rover, dont 93 % des véhicules écoulés en Europe ont une dépendance similaire.

Avec 52 % de ses revenus concernés, Honda est également soumis à l'inquiétude d'un potentiel Brexit sans accord et la fermeture de son usine de Swindon, la seule qu'elle possède sur le territoire britannique, n'est peut-être pas étrangère aux risques liés à cette sortie totale de l'Europe. L'usine fermera ses portes en 2022 et officiellement, cette décision est liée au contexte actuel du secteur.

BMW Group, qui possède la marque anglaise Mini, est également concerné à hauteur de 30 % de ses ventes européennes, tandis que cela représente 23 % pour Toyota. Pour Ford et l'alliance Renault-Nissan, ce sont 19 % des immatriculations européennes qui sont touchées, et ce chiffre descend à 16 % pour PSA. VW Group, malgré l'ampleur du chiffre concerné, s'en sort bien sur le plan relatif puisque seuls 13 % de ses véhicules vendus en Europe sont en lien avec le Royaume-Uni.

Les prochaines semaines vont donc être cruciales pour l'avenir de ces échanges, dont le refroidissement pourraient avant tout impacter les automobilistes, puisque les 2,91 millions de voitures concernées seraient alors vendues avec application des taxes normalement réservées aux États tiers. Bien évidemment, cela pourrait totalement redessiner le paysage automobile européen par la chute de certains marchés, qui obligeront forcément les acteurs du secteur à changer de stratégie concernant le Royaume-Uni.

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