Un peu d'histoire

Disputé sous l'appellation World Touring Car Championship de 2005 à 2017, le Championnat du monde de supertourisme fait peau neuve pour la saison 2018.

Depuis ses débuts en 2005, la série est destinée aux voitures de réglementation Super 2000 (ou S2000), à savoir des véhicules dérivés de la production (avec une production minimum de 2500 exemplaires lors de l'année précédente), une cylindrée plafonnée à deux litres, et aucune aide électronique au pilotage. En 2011, les moteur 1,6 litres turbo étaient admis à leur tour, et ont fini par remplacer totalement les anciens blocs deux litres aspirés au sein du peloton. Une nouvelle étape était abordée en 2014 avec l'introduction de la réglementation TC1, qui permettait alors aux constructeurs (ou leurs préparateurs) de développer des kits aérodynamiques plus conséquents et de porter la puissance de leur moteur à plus de 380 chevaux, grâce notamment à l'augmentation de la bride d'admission.

Au fil des années cependant, le plateau du WTCC s'est réduit jusqu'à ne plus présenter en 2017 qu'une grosse quinzaine de voitures au départ de chaque épreuve. Si l'équilibre s'était maintenu durant une dizaine d'années entre les équipes officiellement soutenues par les constructeurs, et les structures privées, ces dernières ont quitté le championnat petit à petit en raison de l'inflation des budgets, surtout à partir de la période TC1. De plus, les constructeurs impliqués depuis les débuts du WTCC ont peu à peu quitté le navire : BMW tout d'abord, pour s'en aller batailler dans le DTM allemand, puis SEAT, puis Chevrolet. Si l'arrivée de Citroën, en même temps que la réglementation TC1 en 2014, a semblé apporter une bouffée d'air frais au championnat, l'écrasante domination de la marque aux chevrons a fini de décourager certaines équipes privées.

En 2017, seules les marques Honda et Volvo étaient encore impliquées officiellement en WTCC, mais Honda s'apprêtait à son tour à se retirer d'une série dont l'avenir demeurait flou dans sa formule de l'époque. Il était temps de faire machine arrière.

Un nouveau chapitre

Décision a donc été prise de changer de réglementation, et de philosophie pour 2018. En vue de réduire les budgets, c'est la réglementation TCR qui a été choisie pour ouvrir cette nouvelle ère. Un concept créé en 2014 par l'Italien Marcello Lotti (ancien promoteur du… WTCC), et qui a rapidement rencontré un succès considérable grâce à deux mots d'ordre : des voitures encore plus proches de la série, et interdiction aux équipes officielles d'y concourir.

Pour 2018, les deux championnats, WTCC et TCR, ont ainsi uni leur destinée pour former un tout nouveau package mondial : le WTCR, qui bénéficie à la fois de la réglementation attractive du TCR, et du cadre du WTCR, en premier lieu son calendrier et sa promotion globale, et une diffusion en direct à la télévision. Les rôles sont bien définis entre la FIA (la fédération internationale, qui réglemente la série), Eurosport Events (promoteur du championnat) et WSC (société qui détient les droits du concept TCR, qui veille à la réglementation technique et aux processus d'homologation en lien avec les constructeurs). Le tout nouveau championnat se nomme ainsi officiellement WTCR - FIA World Touring Car Cup.

2018 Honda Civic Type R TCR

Technique :

La réglementation du TCR impose des véhicules à transmission à l'avant, quatre ou cinq portes, berlines ou à hayon, utilisant un moteur turbo de série d'une cylindrée comprise entre 1750 et 2000cc, développant une puissance maximale de 350 cv.

Afin d'assurer une certaine équité entre les différents modèles engagés, la Fédération Internationale de l'Automobile (FIA) et le département technique du TCR ont établi une Balance de Performance (BoP), qui vise à niveler les performances artificiellement en jouant sur le poids des voitures et leur puissance (avec un ajustement de la bride d'admission du bloc moteur). La BoP évolue ensuite toutes les deux courses, grâce à un système de calcul automatique qui prend en compte les temps au tour des différents modèles lors des deux meetings précédents, et qui ajuste ensuite les lests (jusqu'à un ajout de 60 kg maximum) et la puissance moteur pour chaque modèle.

Pour limiter les coûts, un seul moteur est alloué par voiture pour une saison, et tout changement de bloc engendre des places de pénalités sur la grille de départ. Le nombre de turbo par voiture est également limité à cinq pour une saison.

On ajoutera également que, preuve de la popularité du TCR, pas moins de 19 championnats  basés sur cette réglementation ont fleuri à travers le monde depuis 2015. Et, à ce jour, plus de 600 voitures aux spécificités du TCR ont été construites, et vendues à des écuries clientes.

Plusieurs constructeurs se sont ainsi intéressés au concept, et ont rapidement développé des véhicules de cette réglementation via leur division compétition client : Honda et Seat furent les premiers à s'investir dans le TCR, bientôt suivis par Volkswagen, Audi, Hyundai ou Peugeot, notamment.

Avec des évolutions extrêmement limitées sur les véhicules engagés, les coûts devenaient attractifs et le TCR, après avoir lancé sa série internationale en 2015, a multiplié les lancements de championnats régionaux (Europe, Asie, Moyen-Orient, Scandinavie, etc.) et nationaux (Italie, Allemagne, Grande-Bretagne).

Audi RS3 LMS TCR Mondial de l'Automobile
Sébastien Loeb Racing, Golf GTI TCR

"C'est la première page d'un nouveau chapitre", a expliqué François Ribeiro, le directeur de Eurosport Events, promoteur du championnat, et 'patron' de la série, à Motor1 à l'occasion de l'ouverture à Marrakech. "Avec Marcello [Lotti, le promoteur du TCR], nous avons compris que c'était le sens de l'histoire. Il avait développé une belle réglementation, qui a intéressé un certain nombre de constructeurs qui ont voulu développer une voiture dans ce cadre. Mais son équilibre était fragile, et il lui fallait une structure solide pour évoluer, et pour perdurer. Les éléments étaient déjà connus, la clé était le niveau d'ambition que l'on souhaitait mettre dans ce produit."

"Je suis persuadé que, dans le sport automobile, ce n'est pas le volume qui fait la valeur d'une discipline. Et puis si l'on a trop de voitures, c'est difficilement gérable. C'est pourquoi nous avons limité le plateau à 26 concurrents, ce qui constitue déjà une belle grille."

Sept modèles au départ

25 voitures étaient précisément au départ de la première étape de la saison, sur le circuit urbain de Marrakech, alignées par douze équipes privées, dont certaines bénéficiant d'un soutien plus accentué d'un constructeur.

Sept modèles différents sont représentés pour cette première saison du WTCR (sur la vingtaine de modèles ayant été homologués à la réglementation TCR) :

  • Hyundai i30 N TCR
  • Peugeot 308 TCR
  • Cupra TCR
  • Honda Civic Type R TCR
  • Alfa Romeo Giulietta TCR
  • Volkswagen Golf GTI TCR
  • Audi RS 3 LMS TCR
Hyundai i30 N TCR
Honda Civic Type R TCR
Volkswagen Golf GTI TCR
Audi RS3 LMS TCR
Cupra TCR
Peugeot 308 TCR
Alfa Romeo Giulietta TCR

On notera que la Balance de Performance (BoP) permet au régulateur de niveler les performances de tous les modèles en attribuant des lests plus ou moins élevés à chaque modèle, une réduction ou une augmentation de la puissance moteur (par le biais du diamètre de la bride d'admission).

Des mesures ajustées au fil de la saison grâce aux lests de performance qui permettent, à chaque course, d'ajouter ou d'enlever du poids à certains modèles en fonction de leurs performances lors des épreuves précédentes.

Parmi les pilotes, on retrouve les grands noms de la discipline, avec notamment quatre anciens champions du monde de WTCC (Gabriele Tarquini, Thed Björk, Yvan Muller et Rob Huff), deux anciens pilotes de F1 (Tiago Monteiro et le même Tarquini), et de nombreux grands noms de la spécialité, ayant brillé et décroché des titres nationaux, en Europe ou en Amérique du Sud. Le peloton brasse différentes générations de pilotes, entre les confirmés et les petits nouveaux en supertourisme. Ainsi, alors que Gabriele Tarquini, le vétéran du plateau, affiche 56 ans bien tassés, le jeune Benjamin Lessennes sautera dans le grand bain à 18 ans seulement.

Pilotes WTCR 2018

En ce qui concerne le calendrier, on retrouve les circuits pratiqués par le WTCC, avec un programme de dix meetings répartis sur quatre continents (Europe, Asie, Amérique du Sud et Afrique). Le WTCR visite notamment la terrible Nordschleife sur le Nürburgring, et se conclut sur le non moins mythique circuit urbain de Macao en novembre.

Calendrier 2018 du WTCR : 

  • 7 et 8 avril : Marrakech (Maroc)
  • 28 et 29 avril : Hungaroring (Hongrie)
  • 10 et 12 mai : Nürburgring Nordschleife (Allemagne)
  • 19 au 21 mai : Zandvoort (Pays-Bas)
  • 22 au 24 juin : Vila Real (Portugal)
  • 3 au 5 août : Termas de Rio Hondo (Argentine)
  • 28 au 30 septembre : Ningbo International Speedpark (Chine)
  • 5 au 7 octobre : Wuhan (Chine)
  • 25 au 28 octobre : Suzuka (Japon)
  • 15 au 18 novembre : Macao

Un format dense

Quant au format, le WTCR se dispute sur deux journées.

Premier jour :

  • Essais Libres 1 (30 minutes)
  • Essais Libres 2 (30 minutes)
  • Qualifications 1 (30 minutes, 40 minutes sur les circuits en ville)
  • Course 1 

Deuxième jour :

  • Qualifications 2 - Q1 (20 minutes, 30 minutes sur les circuits en ville)
  • Qualifications 2 -  Q2 (10 minutes, 15 minutes sur les circuits en ville)
  • Qualifications 2 - Q3 (les cinq meilleurs de Q2 se disputent la pole sur un tour lancé)
  • Course 2 (grille inversée pour le top 10 de la Q2)
  • Course 3 (grille définie au cumul des classements après Q3)

Les dix premiers de chaque course marquent des points, et les cinq premiers des qualifications se voient également attribuer des unités à leur compteur. 

Action

"Pour faire un bon championnat, il faut deux choses : une grille très forte, avec des pilotes de valeur, et un calendrier qui tienne la route", continue François Ribeiro. "Si vous avez ces deux éléments, tout ce que vous pourrez faire en promotion, en diffusion TV, etc., découle tout seul. Nous avons une série forte, et pour qu'elle continue à l'être, il faut garder ce triptyque et cette cohésion entre la FIA, Eurosport Events et WSC. Et surtout, ne pas laisser les constructeurs s'impliquer, car cela peut vite partir en vrille au niveau des budgets, et on tuerait le championnat au bout d'un an."

"Cela sera très serré. Cela va se jouer au niveau des équipes, des pilotes. Et en fonction des circuits, telle ou telle voiture sera plus ou moins performante, en raison de l'incroyable variété des circuits du championnat." 

 

Lors de l'ouverture à Marrakech, ce sont les Hyundai qui se sont montrées au-dessus du lot. Les voitures coréennes ont remporté deux courses sur trois avec l'incontournable Gabriele Tarquini, qui avait mené le développement de i30 N TCR tout au long de l'année 2017. L'Italien a remporté les courses 1 et 3 après avoir signé la pole position le dimanche, alors que c'est Jean-Karl Vernay qui s'est imposé lors de la course 2, alors qu'il partait en deuxième position grâce à la course inversée.

Les bagarres n'ont pas manqué à tous les étages du peloton, ce qui augure une saison riche en rebondissements.

Rendez-vous les 28 et 29 avril pour la suite des hostilités, du côté de Budapest.