Dans une période où l'écologie devient une préoccupation urgente, les constructeurs du secteur automobile visent une baisse drastique des émissions de CO2, qui devront de toute façon se conformer à une législation à ce sujet dans les prochaines années. Néanmoins, malgré les efforts effectués par l'ajout de voitures électriques dans leur gamme ou encore par l'hybridation massive de leurs modèles, une solution qui a fait de Toyota le constructeur le moins polluant d'Europe, les émissions globales sont toujours en hausse.
Dès lors, des solutions sont cherchées afin d'endiguer ce phénomène inquiétant, qui trouve sa source dans une cause principale, à savoir le développement du marché des SUV. Celui-ci représente désormais plus d'un tiers des ventes de voitures en Europe, à hauteur de 36 %, mais la physionomie de ces véhicules est la première cause des hausses d'émissions polluantes, puisqu'il s'agit de véhicules lourds, avoisinant ou dépassant les deux tonnes, et au coefficient aérodynamique très peu efficient.
La Norvège a atteint ces seuils il y a trois ans
Or, l'Europe imposera des normes d'émissions fixées à 95 g/km de CO pour 2021, avec une réduction supplémentaire de 37,5 % de ces chiffres à l'horizon 2030. Des objectifs qui vont être très difficiles à tenir alors que Toyota affiche pour l'instant une moyenne de 99 g/km dans sa gamme, et que la moyenne européenne frôle les 120 g/km. Mais outre le problème des SUV, c'est globalement le poids des voitures qui pose problème, puisque plus de poids dit plus de consommation et par logique, plus d'émissions polluantes.
La solution pourrait alors venir de la Norvège, qui a décidé d'indexer le bonus et le malus offert à l'achat des voitures sur le poids de celles-ci. Cela a permis au pays, où le marché de l'électrique est en pleine expansion, d'atteindre les 95 g/km dès 2016 ! La Norvège avait également tenté de faire annuler le bonus offert aux acheteurs de SUV électriques de plus de 2 tonnes, ce qui transformerait par exemple le bonus de 6000 euros de l'Audi e-tron en malus de 10'000 euros, mais cela n'a pas été accepté.
S'attaquer aussi à la production
Adapter le bonus et le malus écologique des voitures à leur poids pourrait aussi encourager les constructeurs à jouer le jeu et à produire ainsi des voitures moins grosses, et donc moins lourdes, ce qui aurait pour effet de réduire les émissions polluantes, même si ça ne serait pas suffisant en l'état actuel des choses. En effet, il faudrait que les constructeurs réduisent leurs émissions moyennes de 10 g/km par an pendant les deux prochaines années pour atteindre le seuil fixé, ce qui ne s'est jamais vu.
Enfin, le bilan carbone des voitures ne commençant pas au moment où elles sont mises sur la route, il faudrait aussi revoir en profondeur les méthodes de production, en relocalisant la production plus près, mais aussi en utilisant des énergies propres pour faire fonctionner les usines. L'idée serait notamment d'aider les constructeurs via des subventions normées autour de l'empreinte carbone de la fabrication, ainsi que sur le recyclage des voitures et de leurs batteries.
Enfin, une taxe carbone ajustée aux frontières et au kilométrage parcouru entre la production et la commercialisation pourrait aussi forcer les marques à produire davantage localement. Des pistes qui vont devoir être étudiées si l'on veut atteindre les normes fixées autour de l'automobile dans les prochaines années, et si le secteur automobile veut réellement agir pour l'urgence climatique.
Source : Nicolas Meilhan, pour France Stratégie