Les chiffres dévoilés il y a quelques jours par la Sécurité Routière sont très clairs : les jeunes sont très fortement représentés dans les accidents mortels sur la route. Plus précisément, en février 2022, pas moins de 38 jeunes entre 18 et 24 ans ont trouvé la mort au volant, soit quatre de plus que sur le même mois de 2021.
Si cette tranche d'âge ne représente que 8 % de la population française, elle représente en revanche 18 % des personnes tuées. Et au niveau national comme mondial, les accidents de la route constituent la première cause de mortalité chez les jeunes adultes.
C'est pour tenter de mieux comprendre cette surreprésentation des jeunes dans les accidentés au volant que la Fondation Vinci Autoroute a soutenu la réalisation d'une étude sociologique. L'occasion d'éclaircir le rapport des jeunes à la conduite et à l'automobile grâce à 150 entretiens approfondis menés avec des jeunes de 18 à 25 ans, d’origines géographiques diverses.
Et le constat est sans appel : les jeunes prennent plus de risque au volant. Notamment à cause du téléphone.
Le début de la liberté
David Le Breton, professeur de sociologie à l’université de Strasbourg, qui a piloté l'étude, a pu constater que la voiture reste un outil de liberté.
La voiture est "un signe indispensable du fait de se ‘sentir’ adulte, un indice tangible de maturité. Elle incarne la liberté de mouvement, l’autonomie au regard des parents ou des amis, elle est au cœur de la sociabilité adolescente quand elle abrite les premiers amours, contribue aux déplacements vers les lieux de fête ou les appartements des amis, les balades… ".
Des risques très masculins
L'étude souligne également qu'en dépit d'une convergence progressive entre les sexes dans la société actuelle, diminuant les différences liées aux genres, les risques pris au volant restent très "masculins". Ainsi le sociologue David Le Breton parle d'une mécanique de manifestation de virilité chez des jeunes gens, comme si ça participait "de la construction de soi".
Si les jeunes restent conscients que les faculté d'anticipation et d'adaptation sont nécessaires au volant, le fait de prendre des risques reste aussi une manière d’éprouver la maîtrise de son existence, de "reprendre le contrôle" et "expérimenter le péril pour le dompter". Comme si cette toute-puissance au volant était le meilleur moyen de dompter le danger. Mais c'est surtout ce qui pousse les jeunes à prendre des risques inconsidérés, vitesse, alcool au volant...
Hyperconnexion au portable
Enfin l'étude sociologique met le doigt sur un problème central : le téléphone portable. Ils restent en permanence connectés à leur smartphone, comme si le fait d'être déconnecté le temps de la conduite était plus important que le fait d'être déconcentré par l'utilisation du téléphone. Le jeunes n'arriveraient donc pas à se détourner de l'usage de leur compagnon numérique, ce qui engendrerait une forte perte de vigilance.
Enfin le sommeil est également pointé du doigt dans l'étude, avec des jeunes qui n'écoutent pas leur corps. S'ils attribuent leur fatigue à la route (trajet long, monotonie de la route), en réalité c'est leur corps qui est en train de changer, comme l'explique le Professeur Carmen Schröder, professeur de pédopsychiatrie des hôpitaux universitaires de Strasbourg et spécialiste du sommeil :
"L’adolescence et le début de l’âge adulte sont une période particulière du développement, où le sommeil et les rythmes de vie sont soumis à d’importantes modifications qui se manifestent par un décalage progressif des heures de coucher et de lever… Cette période de vie est celle où la somnolence va avoir un vrai impact, non seulement sur la conduite automobile, mais plus généralement sur les conduites à risques".
Nouvelle campagne de sensibilisation
C'est dans ce sens que la Fondation Vinci Autoroutes vient de lancer une nouvelle campagne de sensibilisation à destination des jeunes, pour mieux faire comprendre les risques qu'il y a au volant. La campagne vidéo est nommée "La notif’" et met en scène le Youtubeur Théodort et le comédien Sohan Pague :