Il y a des essais qui ne se refusent pas. Surtout quand on vous appelle en vous annonçant qu'il s'agit très certainement de l'une des seules opportunités qui vous seront données pour essayer ce genre de voiture. Une Aston Martin V12 Vantage S, avec une boîte manuelle. En 2017. Ça ne se refuse pas, non. Pourtant, on aurait pu faire la fine bouche tout en sachant que nous avons essayé il y a quelques mois la toute dernière Aston Martin née : la DB11. Mais la seule évocation de la boîte mécanique, associée à un V12 qui plus est, a suffi à nous faire hérisser les poils.

C'est sans doute l'ultime version de la V12 Vantage. D'ici peu, elle sera remplacée par une nouvelle génération, et nous ne sommes pas certains de retrouver un tel alliage. La "baby Aston", comme on aime l'appeler, n'a rien d'enfantin. Elle est sans doute le porte-étendard d'une philosophie qui tend à être révolue. Voiture destinée aux connaisseurs et aux passionnés, un poil masochistes pour user d'une boîte manuelle avec une telle mécanique sous le capot, l'Aston Martin V12 Vantage S BVM7 est sans doute d'ores et déjà un collector. En France, la marque nous affirme en avoir vendu six sous cette configuration. Investisseurs, nous vous laissons à vos études sur ce chiffre. Passionnés, un tantinet fortunés, il est temps de vous réveiller.

Aston Martin V12 Vantage S

Belle comme au premier jour

L'Aston Martin V12 Vantage S, c'est une voiture au style intemporel apparue en 2005. Si, comme dans la vie, on a tendance à dire qu'il faut passer le cap des sept ans, elle, elle les a largement passé, et nous sommes toujours fous amoureux. Pourquoi ? Car elle a su se réinventer tout simplement, nous surprendre, et ne pas rester sur ses acquis.

Pour redécouvrir l'une des plus belles Aston Martin, notre V12 Vantage s'est parée très certainement de l'une de ses plus belles configurations. Un savant mélange entre du carbone au niveau de certains éléments comme le diffuseur ou encore la lame avant, le blanc lumineux "Speedway White" qui recouvre la carrosserie, et ces quelques touches d'orange, sur les flancs, le contour de la calandre, le bas du diffuseur et aux extrémités des boucliers. Les traits de la Vantage sont directement hérités de la DB7. Nous devons la Vantage au coup de crayon d'un certain Henrik Fisker. Celui qui a donné son nom à la Karma. Nous lui devons d'autres créations de renom : l'Aston Martin DB9, la BMW Z8, ou encore, plus récemment, la VFL Force 1 V10.

Aston Martin V12 Vantage S
Aston Martin V12 Vantage S

Mais la Vantage est avant tout une Aston Martin. Une marque qui transpire l'élégance, la classe – dans le sens propre du terme –, et la sportivité. Conjuguer ces trois adjectifs, aucun autre constructeur n'a su le faire. L'image de marque est irréprochable. Que l'on soit jeune, vieux, père de famille, ou n'importe qui, une Aston Martin marie la distinction et la discrétion et ça, tout le monde s'accorde à le dire.

Le temps passe...

... et beaucoup de choses ont changé. Il en va de même pour l'intérieur de cette Aston Martin V12 Vantage S. Une fois à bord, nous pénétrons bien entendu au sein d'un habitacle de standing, mais maintenant assez largement dépassé. Pourquoi lui en tenir rigueur ? La voiture n'est plus toute jeune mais offre tout de même de jolies prestations pour son âge. Hormis le système d'info-divertissement complet mais daté, avec des graphismes d'un autre temps, le reste est de très bonne facture avec des matériaux de grande qualité.

Aston Martin V12 Vantage S
Aston Martin V12 Vantage S

Notre version d'essai est affublée d'Alcantara étendu sur l'intégralité de la planche de bord et sur les sièges. Il se mêle au cuir qui vient cercler la console centrale, l'accoudoir, et les renforts latéraux de l'assise. Seuls quelques plastiques viennent légèrement ternir l'ensemble, notamment au niveau des buses d'aération et de quelques commandes anecdotiques. Au niveau des parties basses, pas de plastiques apparents non plus, l'ensemble est recouvert d'une épaisse feutrine.

Aston Martin V12 Vantage S
Aston Martin V12 Vantage S
Aston Martin V12 Vantage S

Espèce en voie de disparition

Soyons clairs, l'Aston Martin Vantage est loin d'être aussi incisive qu'une Porsche 911 actuelle, loin d'être aussi pointilleuse qu'une McLaren, ou encore loin d'être aussi efficace qu'une Mercedes-AMG GT R. Mais quoi de plus logique ? Cela fait bien une décennie que la marque anglaise se repose sur son châssis et actualise tant bien que mal sa Vantage à grands coups de variantes principalement réalisées à la demande du service marketing. Mais Aston Martin a toujours eu ce supplément d'âme en plus. Celui qui lui pardonne ses défauts. Celui qui nous les fait oublier dès la simple pression sur la pédale de droite.

La V12 Vantage S appartient au passé, un passé non révolu mais qui tend à le devenir. Aston Martin a conclu récemment un partenariat avec Mercedes-AMG, qui a pris pour la première fois forme sous la DB11. Peu à peu, ce sont de nouvelles variantes qui vont naître, comme la prochaine DB11 V8 ou encore la nouvelle V8 Vantage qui seront toutes les deux équipées du moteur V8 4,0 litre bi-turbo signé Mercedes-AMG. Associé à une boîte robotisée à double embrayage certainement.

Aston Martin V12 Vantage S
Aston Martin V12 Vantage S

Ce que nous essayons de vous dire par là, ce n'est pas que le V12 est mort, loin de là, tout comme les moteurs atmosphériques. Ils ont encore de beaux jours devant eux, notamment en Italie non loin de Maranello et de Sant'Agata Bolognese. La boîte manuelle conservera toujours ses lettres de noblesse par rapport à une boîte à double embrayage, pourtant plus rapide. En témoignent Porsche et sa dernière 911 GT3. C'est l'alliance des trois qui nous interpelle. L'Aston Martin V12 Vantage S BVM7 est la seule survivante de cette philosophie, clé d'un plaisir automobile à l'état pur, aujourd'hui remplacé par la course à la performance.

Ses défauts font ses qualités

Avant de débuter son test routier, un mot tout de même sur sa mécanique. Il s'agit d'un moteur V12 de 5,9 litres de cylindrée, atmosphérique, développant 573 chevaux (à 6750 tr/min) et 620 Nm de couple (à 5750 tr/min). La puissance est uniquement distribuée aux roues arrière via une boîte de vitesses mécanique à sept rapports. Le 0 à 100 km/h est abattu en un peu plus de 4 secondes (3,9 secondes avec la boîte robotisée Sportshift 3) et le constructeur annonce une vitesse de pointe de 323 km/h. Pour en terminer avec les chiffres, la voiture pèse environ 1630 kilos.

Le moteur V12 est un vrai régal comme vous devez vous en douter, coupleux et plein à tous les régimes, il délivre un son absolument indescriptible une fois les 3500 tr/min passés. Étonnamment pour un bloc atmosphérique, nous pensions qu'il allait lorgner bien plus haut dans sa zone rouge. Finalement, une fois les 7000 tr/min passés, le moteur s'essouffle un peu. Pour être plus concret, il en montre beaucoup à bas régime, mais quand on l'explore comme il se doit, il montre rapidement ses limites. Précisons, même si c'est anecdotique, qu'il est parfaitement utilisable pour un usage conventionnel.

Aston Martin V12 Vantage S

La boîte de vitesses manuelle à sept rapports demande quant à elle un léger temps d'adaptation. Le sens des rapports est inversé, c'est-à-dire que la première se situe à la place de la seconde, et la seconde à la place de la troisième. Concrètement, avec un V12 gorgé de couple à l'allonge et à l'agrément phénoménal, le premier rapport ne sert pas à grand chose. D'ailleurs le rapport est court, et ne sert qu'en cas de démarrage canon. Pour une utilisation conventionnelle, le démarrage en seconde peut faire l'affaire. Dans ce sens, le grillage inversé de la boîte n'est plus gênant. Son étagement est parfait, les débattements du levier très courts, et ses verrouillages précis, seul le guidage est à revoir à nos yeux, mais rien de dramatique. Dommage en revanche que la course de la pédale d'embrayage soit aussi longue.

Nous parlions de défauts dans le sous-titre. Elle en a quelques-uns. Comme son châssis assez vieillissant ou encore son poids, malgré un bloc tout en aluminium. Un V12 sur le train avant, forcément cela se ressent. Nous nous méfions donc du comportement joueur de l'auto qui pourrait vite faire passer l'arrière à l'avant. Déjà, le couple à bas régime déborde, l'accroche n'est donc pas excellente et toute la puissance à bien du mal à passer au sol. À chaque accélération un peu franche, tenez fermement le volant, l'arrière a tendance à vouloir s'amuser, mais fort heureusement l'ESP verrouille plutôt bien l'ensemble malgré quelques maladresses.

Aston Martin V12 Vantage S
Aston Martin V12 Vantage S

Une fois les premiers virages et les premières épingles passés, ESP enclenché, l'auto se montre assez surprenante dans le sens où nous nous attendions à valser de gauche à droite et à limite se battre avec le volant. Il n'en est rien, et heureusement avec plus de 1600 kilos et un train avant hyper lourd à tenir. Ce comportement, plutôt saint, est dû aux excellents pneumatiques Pirelli Trofeo qui, une fois bien chauds, assurent un grip latéral assez impressionnant. Impossible de prendre notre Aston Martin en défaut, elle s'accroche, se tord un peu dans tous les sens, s'affaisse un peu sur ses appuis, mais ne décroche jamais ! Pourquoi ?

À cause de l'ESP resté enclenché sûrement ? Enlevons-le alors ! Ça devient plus brut, plus sauvage, mais ça ne décroche toujours pas comme on l'imaginait malgré un tempérament bien plus mordant. Le train arrière dérive un peu, mais est vite remis dans le droit chemin par un ESP pas totalement désactivé et un peu maladroit. L'électronique veille toujours. L'Aston Martin V12 Vantage S est sécurisante mais un peu bancale à ce sujet. C'est-à-dire qu'elle se montre légèrement sous-vireuse avant d'être survireuse. C'est assez inconstant qui plus est, notamment sur la remise des gaz, en plus d'un léger temps de latence qui ne met pas vraiment en confiance.

Aston Martin V12 Vantage S

"Tu ne veux pas partir en dérive ?" Qu'importe, prime à l'efficacité donc. Elle nous a d'ailleurs surpris, puisqu'à certains endroits, nous ne sommes pas sûrs qu'elle aurait été moins vite qu'une McLaren. Les pneumatiques dont elle est équipée l'aident beaucoup. Nous nous essayons à l'exercice du talon-pointe, sans succès, le pédalier n'est pas vraiment fait pour et dans tous les cas la boîte simule le coup de gaz à la rétrogradation à notre place.

Notre Aston Martin est équipée de freins en carbone - céramique (398 millimètres à l'avant et 360 millimètres à l'arrière) avec étriers fixes à six pistons à l'avant et quatre pistons à l'arrière. Quand ils sont à température, rien à dire, les freins sont mordants et endurants. En usage quotidien, c'est-à-dire quand les freins sont froids, il faudra insister un peu plus sur la pédale du milieu si l'on souhaite stopper l'auto.

Conclusion

Après avoir tourné autour du pot pendant près de deux jours avec cette Aston Martin, c'est le moment d'essayer de conclure. Parfaite, avec plein de jolis défauts, c'est ce pourquoi elle nous plaît. Ceux qui recherchent l'efficacité, passez votre chemin, Porsche saura vous satisfaire. Ceux qui recherchent du luxe ? Passez également votre chemin, Bentley vous ravira. Ceux qui recherchent de la personnalité et de l'exclusivité ? Vous êtes là où il faut.

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À l'heure où le V6 et le V8 écrasent le V10 et le V12 atmosphérique à grands coups de suralimentations, à l'heure où la boîte robotisée à simple ou double embrayage croque de la boîte mécanique, à l'heure où le turbo souffle dans les bronches de tous les moteurs, il vous reste cette Aston Martin V12 Vantage S. Une GT dans sa plus pure tradition. Une voiture qui associe élégance, distinction et discrétion. Il s'agit sans doute de l'une des voitures les plus sensationnelles dont j'ai pu prendre le volant.

Photos : Yann Lethuillier / Motor1.com

 

 

Points positifs Points négatifs
Boîte manuelle à sept rapports Électronique omniprésent
Moteur V12 atmosphérique Course de la pédale d'embrayage
Sonorité enivrante Poids assez élevé

Galerie: Essai Aston Martin V12 Vantage S BVM7 (2017)

Aston Martin V12 Vantage S BVM7

Motorisation Essence, 12 cylindres en V, 5935 cm³, injection multipoints
Puissance 573 chevaux / 620 Nm
0-100 km/h 4,1 secondes
Vitesse de pointe 323 km/h
Transmission Boîte manuelle à sept rapports
Type de transmission Propulsion
Poids 1630 kg
Volume de coffre 239 litres
Places 2
Economie de carburant Urbain : 22,5 l/100 km / Extra-urbain : 10,2 l/100 km / Mixte : 14,7 l/100 km
En vente 2016
Prix de base 184'645 €
Prix de la version testée 184'645 €

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