C'était une apparition particulièrement attendue par tous. Et sans doute tout autant par le principal intéressé. Carlos Ghosn a donné sa conférence de presse ce mercredi 8 janvier 2020 à 14h00, première apparition publique depuis sa fuite qu'on dit rocambolesque du Japon le 29 décembre 2019. Mais surtout, première fois qu'il peut s'exprimer publiquement depuis qu'il a été arrêté au Japon en novembre 2018.

Une conférence de presse en relativement petit comité, même si retransmise dans le monde entier, durant laquelle l'ex-PDG de l'Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi s'est exprimé de manière très vive durant plus d'une heure, avant de répondre aux questions des journalistes présents. "J'ai attendu ce jour avec impatience depuis plus de 400 jours", a-t-il expliqué, "depuis que j'ai été brutalement enlevé de mon monde, de ma famille, des entreprises pour lesquelles je travaillais et de ses employés."

Dès le départ, Carlos Ghosn a prévenu qu'il ne reviendrait pas sur la manière dont il a fui le Japon : "Je ne vais pas vous expliquer comment je suis parti, mais pourquoi je suis parti". Et a alors commencé une longue charge contre le système judiciaire japonais, de nombreuses fois désigné comme le "japanese hostage justice system". Carlos Ghosn se considérait comme un otage. "L'otage d'un pays", rajoute-t-il avant de dire : "Je ne suis pas là pour me victimiser, mais pour évoquer un système qui viole les principes d'humanité les plus fondamentaux. Je suis là pour laver mon honneur".

Revenu sur ses dures conditions de détention au Japon, Carlos Ghosn dit avoir été "traité comme un terroriste au Japon". Et de rajouter : "Je me voyais rester à vie au Japon", et "c'était de la persécution". Puis il désigne notamment à plusieurs reprises les méthodes d'un procureur qui décidait de tout, même devant les juges. Il a également pointé du doigt plusieurs fois "la collusion entre le procureur et Nissan" : "Ce qui s'est passé ces 14 derniers mois est le résultat obtenu par une poignée d'individus sans scrupules de Nissan avec le soutien du procureur de Tokyo."

Pour Carlos Ghosn, il y a deux raisons principales au fait que Nissan ait précipité sa chute : d'abord le fait qu'en 2017, les performances de Nissan étaient à la baisse. Ensuite, qu'après avoir accepté de rester à la tête de Nissan et Renault, le constructeur japonais a tout fait pour enlever l'influence de Renault sur Nissan. 

D'ailleurs, l'ancien dirigeant qui est servi Nissan pendant 17 ans, particulièrement amer, n'oublie pas de faire un état des lieux de l'état de ses anciennes entreprises : "Depuis mon départ, la capitalisation de Nissan a perdu plus de 40 millions de dollars par jour, et celle de Renault plus de 20 millions d'euros par jour." (...) "Je pense que l'Alliance peut réussir sans moi. Elle doit suivre certaines règles. Mais si on regarde ce qu'il s'est passé depuis 13 mois, je ne suis pas optimiste."

Puis il est revenu sur les différentes charges qui pèsent contre lui, sur tout ce qui lui a été reproché. Et là dessus, Carlos Ghosn est clair : "Tout ça est politique. Je suis innocent de toutes les charges". En pendant la conférence de presse d'expliquer en présentant des documents officiels sur vidéo projecteur, point par point, pourquoi, selon lui, il ne s'est rendu coupable de rien de ce qui lui est reproché.

Il a aussi, encore documents à l'appui, voulu laver son honneur et sa réputation sur des faits pour lesquels il n'est pas poursuivi mais il se dit avoir été sali. Comme les réceptions au château de Versailles où il démontre que, comme Renault avait participé à la réfection de certaines salles, certaines salles lui avaient été prêtées à titre gracieux pour organiser ses événements. Et non pas pour se prendre pour Louis XIV comme cela avait été dit dans certains médias. Autant de documents qu'il tient, dit-il, à la disposition des journalistes. 

"Je ne vais pas attaquer qui que ce soit. Je vais défendre mes droits". S'il s'est défendu de parler des conditions de son évasion du Japon, Carlos Ghosn a dit avoir eu le sentiment de "revenir à la vie" en quittant le pays. Et quand il lui est demandé par le journaliste du Wall Street Journal comment il va vivre désormais, si le prix à payer pour avoir fui le Japon et tenter de se défendre est de rester un fugitif international, il explique qu'il a toujours été habitué aux "missions impossibles".

Des questions en rapport avec sa citoyenneté française ont évidemment également été posées, notamment sur ce qu'il attend de l'État Français : "Je ne demande rien du tout au gouvernement Français. Le gouvernement français a dit "présomption d'innocence". Je les crois. Mais certains m'ont dit coupable sur la base d'audits truqués qui n'ont pas été contradictoires. Ça je ne suis pas d'accord." 

Et de rajouter : "Si la justice française me convoque, je répondrais. Mais ce n'est pas le cas."

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