1972 - Après deux années de domination des Porsche 917, la réglementation des 24 Heures du Mans change. Exit les prototypes 5 litres comme la Porsche ou la Ferrari 512, désormais la place est faite aux petits prototypes 3 litres, comme les Matra notamment. Une réglementation qui profite également aux petites équipes, à l'image de Duckhams.

1972 - 24 Heures du Mans
1972 - 24 Heures du Mans
1972 - 24 Heures du Mans

Duckhams est une entreprise britannique qui produit des lubrifiants. Pour cette édition 1972, Alain de Cadenet, l'un des pilotes, convainc la firme veut justement s'engager avec son propre prototype. Ce sera la... Duckhams, première voiture à porter le nom de son sponsor. Trois ans seulement après la première livrée spécialement produite pour une voiture de course (les Lotus Gold Leaf en Formule 1), la marche en avant du sponsoring se poursuit.

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Petit budget

Avant cela, il faut produire la voiture. Alain De Cadenet, qui engage ponctuellement une Brabham BT33 en F1 avec son écurie Evergreen, se rapproche de l'un des jeunes ingénieurs de chez Brabham : Gordon Murray. Ce même ingénieur qui, plus tard, dessinera les meilleures McLaren et Brabham de F1, ainsi que la McLaren F1. Encore débutant, mais déjà talentueux, De Cadenet lui propose de dessiner la voiture : "Pensez-vous que vous pourriez concevoir un châssis qui ressemble un peu à une Ferrari 312PB et qui correspondrait à mes pièces Brabham ? Et c'est exactement ce qu'il a fait", expliquera, plus tard, Alain de Cadenet.

1972 - 24 Heures du Mans
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Problème, Bernie Ecclestone, patron de Brabham, n'est pas forcément ravi de voir son jeune ingénieur se dissiper ainsi. Un accord est fixé : Murray dessinera des F1 le jour, et la Duckhams la nuit. Le deal est conclu dans un pub londonien.

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Gordon Murray en sort un prototype assez proche dans sa conception de la Ferrari 312 PB. Murray avait un cahier des charges assez restreint. Outre le moteur V8 Cosworth racheté 1500£ chez McLaren – il s'agit de l'ancien moteur vainqueur du Grand Prix de Belgique 1968 –, il doit limiter au maximum les coûts sur la voiture. Aussi, il adapte un maximum de pièces de rechange issues de l'écurie Brabham. Par souci de fiabilité, il double également les tailles des pièces et tous ses résultats de résistance des matériaux. En sort cette Duckhams à moteur Ford, construite en seulement huit semaines. Gordon Murray, lui, ne touchera pour son travail que 250$ et une calculatrice HP.

Solide bricolage

Le Sud-Africain n'est pourtant pas sûr de lui. Un sentiment qui se renforce lorsqu'il constate que sa voiture pèse 690 kg. Pour lui, la Duckhams est trop lourde, il s'est trompé dans ses calculs. Son avis s'inverse d'un coup lorsqu'il constate que les Matra et les Porsche sont plus lourdes, pesant la bagatelle de 720 kg, voire plus. Murray s'inquiète : sa voiture est trop légère, elle ne tiendra pas 24 Heures.

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La course de Cadenet et Craft est remarquable : après un début tranquille, la voiture tiendra la cinquième place jusqu'au petit matin, où une averse enverra Chris Craft en aquaplanning dans le rail. La voiture repartira et terminera à la 12e place. "Cette voiture lancera ma carrière", expliquera plus tard l'ingénieur.

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Une édition marquée par l'accident de Jo Bonnier sur sa Lola. Pilote de F1 et d'Endurance, le Suédois décédera dans l'accident. Pendant ce temps, Hill et Pescarolo dominent la course sur la Matra pour, au final, s'imposer devant leurs équipiers Cevert et Ganley. La première victoire française au Mans depuis... 1950 !

Illustration : Camille De Bastiani

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