Généralement, quand un client a les moyens et souhaite acquérir une voiture à la hauteur de sa fortune, il se tourne plutôt vers le marché du neuf en façonnant sa voiture comme il le souhaite. C'est d'ailleurs pourquoi les marques haut de gamme disposent toutes de département de personnalisation, afin de pouvoir assouvir aux demandes, même les plus folles, de leurs riches clients.
Sauf qu'il y a un paramètre que les constructeurs et les clients ne contrôlent pas, c'est la disponibilité des voitures. Et ces derniers temps, pour diverses raisons, les délais de livraison des voitures neuves se sont rallongées, et pas uniquement dans l'univers du haut de gamme. La pandémie semble avoir globalement changé l'état d'esprit des riches clients qui ne veulent pas attendre plusieurs mois avant de rouler dans la voiture de leur rêve.
Au lieu de ça, ces derniers montrent un plus grand intérêt pour les voitures d'occasion en raison de leur disponibilité immédiate, faisant ainsi monter les prix en flèche. Selon une étude menée par Edmunds, au mois de juin dernier, les prix des supercars et des voitures de luxe d'occasion ont augmenté de près de 30 % par rapport à la même période l'an passé.

Sur le marché des voitures d'occasion, une McLaren 765LT, certes limitée à seulement 765 exemplaires, se vend en moyenne 40 % plus cher que son prix d'achat d'origine. Ce phénomène est évidemment dû à son nombre d'unités relativement faible, mais aussi à la disponibilité immédiate du modèle d'occasion contrairement au modèle neuf. Sans compter qu'il y a certainement un épisode spéculatif compte tenu de la rareté de la voiture.
Autre exemple, cette fois-ci rapporté par nos confrères d'Automotive News Europe, Rolls-Royce possède aujourd'hui une liste d'attente de six mois pour chaque nouvelle commande, et ce même si l'entreprise britannique déclare ne pas être impactée par la pénurie de semi-conducteurs qui sévit actuellement. Toujours selon Automotive News, le fait d'avoir une voiture personnalisée à souhait (ce qui rajoute inévitablement du délai), n'aurait plus vraiment d'importance pour les clients à l'heure actuelle, ces derniers optants plutôt pour un modèle d'occasion en parfait état.
Gerry Spahn, le responsable de la communication de Rolls-Royce en Amérique du Nord, a précisé qu'environ 75 % de leurs ventes provenaient de leur gamme de véhicules d'occasion, soit une augmentation significative de 33 % par rapport à la même période l'an passé. En acquérant des modèles d'occasion, les acheteurs évitent également la dépréciation. Si nous prenons l'exemple d'une Wraith, celle-ci perd 20 % de sa valeur lorsqu'elle quitte la concession, et environ 40 % après cinq ans d'utilisation. Et même pour un client qui a de l'argent, c'est une donnée à prendre en compte.
Rolls-Royce n'est pas la seule marque de luxe touchée par ce phénomène puisque, entre 2016 et 2021, Bentley a vu ses ventes de modèles d'occasion augmenter de 53 %, tandis que les ventes de modèles neufs ont augmenté de 34 % au cours de la même période. Il faut aussi dire que les départements occasion de ces marques incitent les acheteurs à se tourner de plus en plus vers un modèle de seconde main, tant les garanties se rapprochent de celles d'un véhicule neuf.
Les programmes d'occasion comme Ferrari Approved comprennent, par exemple, une inspection minutieuse de la voiture par des techniciens certifiés s'assurant que tout est à la hauteur des normes de la firme de Maranello. La voiture est bien évidemment aussi garantie par le constructeur, pas forcément aussi longtemps et sous les mêmes conditions qu'un modèle neuf, mais cela apporte tout de même un peu plus de confort aux clients.
En plus d'être bénéfique pour l'acheteur, cette stratégie de pousser l'occasion est également bonne pour la marque. Les statistiques montrent qu'elles attirent davantage de nouveaux clients, la majorité d'entre eux restant en plus de ça fidèle à la marque avec laquelle ils ont franchi le pas et basculé dans l'univers du haut de gamme. Pour des constructeurs comme Bentley, le département occasion fonctionne également comme un point d'entrée pour les "jeunes" acheteurs grâce à des prix plus contenus dans l'ensemble.
Néanmoins, reste à voir si cette tendance se maintiendra à l'avenir ou si le monde post-pandémique reviendra à des tendances d'achat davantage portée sur le neuf et l'exclusivité.