La mode des SUV s’essoufflera-t-elle un jour ? Probablement, la mode étant un éternel recommencement. Mais pour le moment, les constructeurs doivent répondre à la demande de leurs clients, et les clients aujourd'hui sont pour la majorité intéressés par ce type de carrosserie. Cela nous amène donc depuis quelques années à découvrir des voitures qui, vingt ans en arrière, n'existaient pas ou très peu. Les SUV sportifs en sont le parfait exemple et aujourd'hui ces autos sont parfaitement intégrées au paysage automobile mondial.
Si le marché des SUV sportifs fut longuement dominé par Porsche et son Cayenne, beaucoup d'autres constructeurs s'y sont aventurés par la suite. Aujourd'hui, il va falloir composer avec un nouveau concurrent de poids, un concurrent qui vient tout simplement de boucler un tour du Nürburgring en 7'51''70, soit le tour bouclé le plus rapidement pour un SUV. L'Alfa Romeo Stelvio Quadrifoglio vient donc bouleverser un segment au fort accent germanique et nous allons voir s'il est plus performant sur route et sur circuit par rapport à ses homologues allemands grâce à un essai mené du côté des petites routes du Sud de la France et à quelques tours sur le nouveau tracé F1 du circuit du Castellet.
Sportif même dans le style
Comme pour la plupart des voitures sportives actuelles, il faut avoir l'œil pour dissocier un modèle au tempérament bien trempé et une version conventionnelle. Concernant l'Alfa Romeo Stelvio Quadrifoglio, disons que c'est plus ou moins facilement perceptible pour un initié puisqu'il en fait juste assez. On remarque bien évidemment ses boucliers spécifiques, ses deux ouïes sur le capot, son large diffuseur qui englobe une quadruple sortie d'échappement, des jantes de 20 pouces ou encore ses étriers de frein noirs (d'autres couleurs sont disponibles en option moyennant 450 euros). Avec un Cx de seulement 0,32, le Stelvio fait parti des bons élèves dans la catégorie en matière d'aérodynamique. Long de 4,70 mètres, large de 2,16 mètres et haut de 1,68 mètre, le Stelvio Quadrifoglio joue plutôt dans la catégorie du Mercedes-AMG GLC 63 ou encore du Porsche Macan en termes de dimensions.


À l'intérieur, globalement, le Stelvio reprend les traits de la Giulia avec une ergonomie légèrement différente néanmoins. La finition et les matériaux nous ont également paru plus soignés par rapport à la berline. Le système d'info-divertissement se contrôle via une molette située sur la console centrale puisque l'écran n'est toujours pas tactile. La navigation n'est pas des plus ergonomiques et nécessite un petit temps d'adaptation. Version sportive oblige, nous remarquons d'emblée quelques détails liés à ses velléités avec des inserts en véritable carbone, des sièges semi-baquets en cuir et en Alcantara au maintien parfait (des sièges Sparco sont également disponibles en option moyennant 3900 euros) ou encore ce volant à trois branches mêlant cuir, carbone et Alcantara (en option à 300 euros). À ce propos, nous aurions préféré avoir de l'Alcantara non pas au sommet du volant mais au niveau où nous positionnons nos mains. Un défaut que l'on a déjà constaté chez d'autres constructeurs comme chez Audi avec sa RS 3 actuelle de première phase par exemple.



Quelques détails techniques
En quelques chiffres, l'Alfa Romeo Stelvio c'est 510 chevaux à 6500 tr/min et 600 Nm de couple de 2500 à 5000 tr/min via son moteur V6 2,9 litres bi-turbo à ouverture à 90° et à désactivation des cylindres. Ce bloc fut développé conjointement avec les motoristes de chez Ferrari. Alfa Romeo annonce un 0 à 100 km/h en seulement 3,8 secondes et une vitesse maximale de 283 km/h. La puissance est distribuée aux quatre roues motrices via une boîte automatique à convertisseur ZF à huit rapports.

Techniquement, ou électroniquement devrait-on dire, le Stelvio n'est pas aussi pourvu que le dernier Porsche Cayenne et ses roues directrices ou ses barres anti-roulis actives. Tant mieux puisque cela permet d'économiser du poids qui, comme tout le monde le sait, est l'ennemi de la puissance. Avec ses 1830 kilos, le Stelvio Quadrifoglio n'est pas une ballerine mais contient relativement bien son poids pour la catégorie et revendique un rapport poids/puissance de 3,6 kg/ch. Cela est notamment dû à l'utilisation massive d'aluminium au niveau des portes, du hayon, des freins, des suspensions ou encore du capot.
Parmi les éléments techniques intéressants, nous pouvons citer par exemple le système de transmission Q4 qui permet de répartir la motricité en temps réel. Un système qui n'équipe pas la Giulia Quadrifoglio qui reste une pure propulsion à titre de comparaison. En temps normal, le Stelvio est une pure propulsion avec 100% du couple sur les roues arrière. En limite de motricité, 50% du couple peut être envoyé sur le train avant via un boîtier de transfert actif et un différentiel avant.


Nous pouvons également citer le Chassis Domain Control, le "cerveau de la voiture" comme l'énonce Alfa Romeo puisqu'il gère les différents systèmes électroniques et les adapte directement en fonction du mode de conduite sélectionné et du type de conduite. C'est le cas par exemple du Torque Vectoring (issu comme la boîte automatique de chez ZF) qui permet de répartir le couple sur chacune des roues de manière indépendante en fonction de la motricité. Un système qui agit sur les roues arrière et qui retarde l'intervention de la béquille électronique en cas de conduite dynamique.
Sur la route
Une fois ces quelques chiffres en tête, nous prenons la route pour un parcours de trois heures à travers les Gorges du Verdon. Version sportive oblige, nous sélectionnons via le DNA (le sélecteur de mode de conduite) le mode dynamique. Nous laissons de côté pour le moment le mode Race puisque nous allons pouvoir l'exploiter sur piste ultérieurement.
D'emblée, une chose nous dérange : l'amortissement. Très sec voire même cassant si la route n'est pas un billard, nous sommes obligés de descendre le niveau de dureté de la suspension pour le bien de notre colonne vertébrale. Heureusement, nous pouvons le faire de manière indépendante et rester en mode dynamique. L'amortissement est clairement plus ferme qu'au sein d'une Giulia Quadrifoglio pour la simple et bonne raison que les ingénieurs ont certainement dû verrouiller les mouvements de caisse en raison d'un centre de gravité plus haut que dans la Giulia afin d'accentuer le comportement dynamique.


Une fois notre configuration parfaite trouvée, nous accélérons le rythme et nous sommes toujours aussi enthousiasmés par le moteur V6 bi-turbo, plein à tous les régimes, et magnifiquement bien accouplé à la boîte automatique ZF à huit rapports qui s'avère aussi performante que certaines boîtes robotisées à double embrayage. Une fois les premières courbes devant nous, les premiers coups de volant pour inscrire la voiture en courbe nous rappellent que nous sommes bien dans une Alfa Romeo. Le train avant est précis et la direction très bien calibrée avec sensiblement les mêmes rapports de démultiplication que la Giulia. Si la berline demeure peut-être encore un peu plus incisive de ce côté face au SUV, le Stelvio se débrouille bien tout de même.
À certains moments il faut évidemment freiner, et c'est là qu'il faut faire attention. Non pas parce que les disques en acier de 390 millimètres à l'avant et de 250 millimètres à l'arrière sont mauvais, loin de là puisqu'ils tiennent plutôt bien la température, mais parce que la pédale de frein est difficile à doser. Spongieuse en début de course, elle actionne violemment les pinces à mi-course causant ainsi de beaux à-coups lors de nos premiers freinages appuyés. Cela ne présage pas grand-chose de bon lors des phases de freinage dégressif sur notre session circuit.
Sur circuit
Pour nous rendre compte des vraies capacités sportives du Stelvio Quadrifoglio, Alfa Romeo nous a donné rendez-vous sur le circuit du Castellet, sur la piste F1, l'occasion de limer l'asphalte de ce nouveau tracé avant le passage des deux Alfa Romeo Sauber de Marcus Ericsson et de Charles Leclerc à l'occasion du prochain Grand Prix de France de Formule 1.


Pour cette session nous enclenchons le mode Race permettant ainsi d'enlever partiellement l'ESP et d'activer les suspensions les plus dures. Force est de constater que sur un véritable billard, le mode le plus ferme est tout simplement idéal et permet de réguler les mouvements de caisse totalement inhérents à ce genre de carrosserie surélevée. Parfait donc à l'approche des premiers virages où notre Stelvio ne se démonte pas malgré son embonpoint. Premier virage et nous constatons que la voiture s'affaisse très légèrement sur ses appuis mais conserve toutefois une bonne tenue de cap. Il faut dire que par rapport à un Porsche Cayenne Turbo par exemple, elle est dépourvue de système de barre anti-roulis active. De ce fait, elle paraît peut-être moins tenue en virage, mais étant plus légère, on s'en extirpe peut-être également avec plus de vivacité.
ESP partiellement déconnecté, la voiture reste relativement saine même si le train arrière ne demande qu'à inverser les rôles avec le train avant. C'est très ludique pour un SUV, les sensations sont naturelles et nous prenons au fur et à mesure un malin plaisir à le placer délicatement au freinage pour faire dérober son train arrière. Gardons toutefois en tête qu'il s'agit d'un SUV, une voiture relativement lourde et au centre de gravité assez haut, attention donc à ne pas se faire avoir par l'inertie.


Enfin, si le nouveau revêtement du Circuit Paul Ricard permet d'avoir un grip encore supérieur par rapport à l'ancien tracé, les pneumatiques Pirelli P Zero ajoutent une couche supplémentaire d'adhérence, notamment au niveau du grip latéral où seuls les mouvements de caisse transversaux nous rappellent que nous ne sommes pas à bord d'une vraie voiture de sport mais bien d'un SUV sportif. Force est de constater qu'après ces quelques tours de piste à bord de la référence du moment dans sa catégorie à l'heure où nous écrivons ces lignes, son temps situé sous les huit minutes sur le Nürburgring ne semble pas usurpé.
Conclusion, prix et consommations
Alors, plus fort que les allemands cet Alfa Romeo Stelvio Quadrifoglio ? Différent disons. Indéniablement plus sportif, il surpasse la plupart de ses concurrents dans de nombreux domaines sans pour autant se barder de technologies en tout genre (roues arrière directrices, barres anti-roulis actives...) qui rajoutent un poids non négligeable au final. En termes de consommations, cela oscille du simple au double en fonction de notre conduite. En usage conventionnel nous nous sommes approchés de la barre des 10,6 l/100 km, tandis qu'en utilisation dynamique l'écran central a très souvent affiché une consommation moyenne aux alentours de 22 l/100 km.
En termes de tarification, l'Alfa Romeo Stelvio Quadrifoglio est sans doute le plus "abordable" avec son prix de base de 91'400 euros avant immatriculation. Un Porsche Macan Turbo s'affichera pratiquement aussi cher avec 110 chevaux de moins tandis que son seul concurrent frontal, le Mercedes-AMG GLC 63 S et son V8 4,0 litres bi-turbo de 510 chevaux, s'échange contre 108'500 euros en prix de base. Le Stelvio Quadrifoglio se positionne donc plutôt bien même s'il faudra s'affranchir des différentes taxes liées à la législation française qui feront grimper la facture à plus de 100'000 euros avant même d'avoir ajouté quelques options.
NB : Les photos qui illustrent cet essai ont été réalisées sur le Circuit des Amériques, à Austin, aux États-Unis.
Points positifs | Points négatifs |
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Boîte automatique fantastique | Amortissement ferme en usage conventionnel |
Moteur vigoureux et engageant | Pédale de frein trop spongieuse en début de course |
Train avant précis | Léger manque de sonorité à bas régime |
Galerie: Essai Alfa Romeo Stelvio Quadrifoglio (2018)
Alfa Romeo Stelvio Quadrifoglio Verde