Le circuit Bugatti au Mans est un petit morceau d’histoire. Tracé permanent adjoint au grand circuit des 24 Heures, il en emprunte la ligne droite des stands, la passerelle Dunlop, avant de bifurquer vers un tracé enchaînant les longues courbes. Un terrain de jeu parfait pour notre Porsche Carrera 4S. Pour preuve, elle y a élu domicile, servant aux séances de l’école de pilotage Le Mans Driver.

Celle-ci offre les meilleures options de la gamme Porsche : la boîte double embrayage PDK, et les quatre roues motrices. Elle l’indique discrètement, sur son capot arrière. Par cette petite bande de feu, qui court sur toute la largeur de la voiture, entre les feux, et cette inscription, comme pour s’excuser de posséder quatre roues motrices.
Déroutante simplicité
Elle cache bien son jeu pourtant, avec ces 420 chevaux qui nichent sous le capot. Le flat six en porte à faux arrière offre la bagatelle de 420 chevaux. De quoi largement permettre à cette auto de 1565 kg d’atteindre les 100 km/h en moins de 3,8 secondes, et les 300 km/h en pointe.


La ligne, elle, affiche le traditionnel style des 911 depuis leur création dans le milieu des années 1960. Un consensus qui passe à travers les âges : assez discrète pour être utilisée tous les jours, et assez remarquable pour ne pas rester dans l’anonymat. Ce dessin, bien rehaussé par le bleu Miami de notre 4S, a su évoluer dans le temps, tout comme les mensurations. La 911 est aujourd’hui une belle GT de 4,5 mètres de long, pour une largeur de 1,85 mètres et un empattement de 2,45 mètres.
L’intérieur est à la hauteur du spectacle offert à l’extérieur. En cuir, avec quelques touches de velours, il ne souffre d’aucune fausse note. Passons la qualités des assemblages, dignes des standards germaniques, les compteurs sont clairs, et ne sont pas cachés par le volant. Voiture de sport oblige, le compte-tours occupe la place centrale, avec l’afficheur des rapports de vitesses. Au centre, la console centrale s’orne d’un écran multifonctions, et ce qui nous intéresse le plus, le levier de vitesse de la boite PDK, qui offre trois possibilités : le tout automatique, la séquentielle via levier, et celle via palettes derrière le volant.


On se sent rapidement à l’aise aux commandes de cette 911. Le volant, presque un peu grand, centralise les modes de la voiture, avec la petite molette en bas à droite. Il se règle facilement, en profondeur comme en hauteur, tout comme les fauteuils à commandes électriques. Un détail important : sur circuit avoir la bonne position de conduite est primordial. Aussi ne faut-il pas hésiter à passer du temps pour se sentir à l’aise. Réglages terminés, il est temps de passer aux choses sérieuses.
Schizophrénie mécanique
La piste est bien humide en cette journée de décembre, et le soleil rasant peine à faire sécher le bitume sarthois. Des conditions qui ne font guère peur à la voiture allemande. En termes d’efficacité, Porsche sait de quoi il parle, et il n’est pas question que de l’humidité vienne dérégler la mécanique bien huilée. Dès le démarrage, la Porsche montre qu’elle en veut. Comme pour intimider son conducteur, lui rappeler qui elle est.

La bête est pourtant bien élevée. Elle s’élance sans à-coups, dans un feulement du flat six tout à fait agréable. Pendant quelques hectomètres, il s’agit de rouler à moins de 60 km/h, vitesse limite dans les stands. Sorte de calme avant la tempête de la piste. Passé la sortie des stands, la 911, tel un docteur Jekyll, se transforme en Mister Hyde. Terminée la douceur mécanique, place désormais à l’efficacité. Montée de rapports, la première chicane saute à la figure. À peine 100 mètres de l’entrée du virage à droite, on saute sur les freins. Le choc lors du contact du pied avec la pédale est brusque, mais ne surprend pas. Sans broncher l’auto reste en ligne, la décélération est constante, et s’inscrit dans la courbe sans sous-virer.
Les quatre roues motrices permettent de ressortir fort de la chicane Dunlop. Et d’attaquer très vite la descente de la Chapelle. Le flat six hurle, laissant entendre ses vocalises nasillardes, entrecoupées, comme des respirations, par les passages de vitesse, presque brusques. Le virage en dévers qui nous fait quitter le grand circuit arrive déjà. Il se fait en deux temps. Un premier temps de freinage où l’on va chercher l’extérieur, avant de replonger vers la corde et foncer vers la longue courbe gauche du musée.
Ici, les trains roulants de la Porsche sont mis à rude épreuve, et malgré le manque d’adhérence, l’auto vire à plat, sans grande prise de roulis, et se reprend bien dès les bas régimes. Même avec un rapport trop haut, l’auto sort fort, et permet d’aborder la quasi-épingle du Garage Vert en fond de 5. Ce virage est l’un des plus lent du circuit.
Aussi, casser la vitesse est important. Le freinage dégressif s’impose plus que jamais. Un coup de pied dans la pédale, et la voiture coupe son élan, et entame une descente d’allure efficace vers les 80 km/h. L’avant ne pompe pas, les mouvements de caisse sont bien maîtrisés.
Une nouvelle fois, le freinage de la Porsche est un allié impeccable. Même après plusieurs tours à haut rythme, le freinage de l’auto ne faillit jamais. De quoi aborder avec confiance l’entrée en courbe. Et en ressortir très fort. Grâce aux quatre roues motrices, la puissance est bien transmise, et permet de se relancer, jusqu'en sixième, vers la chicane du Chemin aux Bœufs. Sans surprise, la Porsche se montre à l’aise dans ce gauche-droit rapide.
Stable, en toutes circonstances
Même les S bleus, que l’on parcourt en troisième, se passent sans soucis. La direction, incisive, permet des placements précis de la voiture. Jamais ou presque, l’auto ne vient vous piéger. Et si tant est que le train arrière tente de se faire la malle, une simple correction au volant la remet dans le droit chemin. Pourtant, la piste n’a pas séché depuis le début du tour.
Un dernier double gauche fait revenir sur la ligne droite des stands. Une nouvelle fois, l'explosif flat six fait parler la poudre, et peu avant la courbe Dunlop, les 250 km/h sont franchis. À cette vitesse, la 911 est d’une stabilité à toute épreuve, même si l’on sent l’arrière un peu plus léger. Qu’importe, à l’attaque de la courbe Dunlop, les freins répondent toujours présents, et la Porsche s’inscrit, presque sur des rails, dans la rapide courbe.
Le tour, lui, s’est fait en moins de 2’15, sans pourtant utiliser les deux tiers du potentiel de la voiture. Pour cela, il faudra laisser un des moniteurs de l’école de pilotage, Marc Peraldi, en faire la démonstration. À découvrir ci-dessous, avec quelques bons conseils à suivre !
Au final, ce qui surprend avec cette 4S, c’est cette polyvalence. Véritable bête d’efficacité sur piste, la 911 offre également un confort d’utilisation remarquable au quotidien, ce qui la rend accessible aux néophytes. En même temps, pour une voiture qui s’affiche à plus de 120'000 euros, un minimum de prestation est attendu. Ce que la Porsche offre aisément. De quoi, sans doute, expliquer son succès, jamais remis en question depuis 1964. Un bail, pour une auto qui n’a jamais été aussi moderne.